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SOUTACHES, CHEVRONS ET GRENADES
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SOUTACHES, CHEVRONS ET GRENADES
par Président Jeu 16 Déc - 23:15
Sujet peu connu sur l'historique des chevrons
Texte écrit par le Colonel Eric DAGNICOURT
Peu de distinctives de l’uniforme de la gendarmerie suscitent autant d’interrogations et d’interprétations que les chevrons des pattes de collet et des fourreaux d’épaules. La méconnaissance n’ayant pas de limites, les « sous-taches » ( !?) identifient même, pour certains, l’ensemble de la patte de collet de la vareuse.
Rappelons donc que la soutache est un effet de passementerie militaire, constituée par un cordonnet de couleur cousu sur un insigne ou un effet d’uniforme. Elle permet de distinguer le grade (soutaches de képi) ou la subdivision d’arme (soutaches de pattes de collet). Par extension étymologique, on tend à utiliser ce terme pour désigner, à tort, les chevrons brodés au-dessus des grenades des fourreaux d’épaules. Après ce bref rappel, l’objet de cette étude est d’expliquer leur apparition sur les insignes de la gendarmerie mobile et de la gendarmerie départementale, ainsi que leur absence de ceux de la garde républicaine et du CSTAGN.
Avant 1914, les armes et subdivisions d’armes de l’armée de terre, à laquelle la gendarmerie est rattachée, se distinguent par les couleurs distinctives des tuniques, pantalons, passepoils et bandes de pantalons, cols, boutons, pattes de parement et de collet des tuniques, bandeau, turban et calot des képis. En ce qui concerne la gendarmerie, dont les couleurs traditionnelles ont été maintenues jusqu’à nos jours, les pattes de collet sont en drap de fond bleu gendarme, ornées d’une grenade, en fil blanc pour les gendarmes, en cannetille d’argent pour les gradés et officiers de la gendarmerie départementale, en fil orange foncé pour les gardes républicains, en cannetille d’or pour les gradés et officiers de la garde républicaine.
L’abandon des couleurs voyantes à la fin de l’année 1914 et leur remplacement par une teinte uniforme, bleu horizon pour les troupes métropolitaines, kaki pour les troupes d’Afrique, puis coloniales, entraîne l’adoption de nouvelles distinctives pour les armes et subdivisions d’armes de l’armée de terre.
Le fond de la patte de collet distingue désormais l’arme, la subdivision de l’arme étant précisée par l’adjonction de deux soutaches de couleur. Ainsi, le fond de la patte de collet est du fond de l’uniforme pour l’infanterie (bleu horizon pour l’infanterie de ligne, bleu foncé pour les chasseurs, kaki pour l’infanterie d’Afrique et coloniale), bleu foncé pour la cavalerie, rouge pour l’artillerie, velours noir pour le génie, vert pour le train, etc.
En ce qui concerne les subdivisions d’armes de l’infanterie, par exemple, les soutaches sont bleu foncé pour l’infanterie de ligne, jonquille pour les chasseurs, rouge pour les zouaves, bleu ciel pour les tirailleurs, vertes pour la légion étrangère, etc.
Le train, qui ne possède pas de subdivisions, n’a pas de soutaches distinctives, de même que les différents services, identifiés par la couleur du fond de la patte de collet et l’existence d’un attribut distinctif brodé. Nous ne rentrerons pas plus dans les détails de ce système, qui pourrait noircir plusieurs pages, mais préciserons cependant que l’existence ou l’inexistence de soutaches distinctives n’a en ce sens rien à voir avec la qualification d’unité combattante.
La gendarmerie conserve à cette époque ses distinctives d’avant-guerre, les deux subdivisions, gendarmerie départementale et garde républicaine se distinguant facilement par la couleur de leurs boutons et de leurs grenades de collet. L’attribution de la qualité de sous-officier à l’ensemble des gendarmes en 1918 modifie la teinte des grenades de la gendarmerie. Celles-ci sont désormais uniformément argent pour la gendarmerie départementale, or pour la garde républicaine.
La création d’une garde républicaine mobile en 1926, et la description de son uniforme, en 1927, ne se traduisent toujours pas par l’apparition des soutaches en gendarmerie. Le fond de la patte de collet de la nouvelle subdivision est bleu gendarme et la grenade est dorée, mais la bombe de cette dernière est évidée et reçoit le numéro de la légion. Il ne peut donc y avoir de confusion avec les pattes de collet de la garde républicaine de Paris.
La défaite de la France en 1940 a pour conséquence, imposée par les clauses d’armistice, la scission de la gendarmerie. La garde républicaine mobile est extraite de l’Arme et désormais rattachée à la cavalerie, sous l’appellation de « Garde ». Elles conserve ses distinctives précédentes, fond de la patte de collet bleu foncé et grenade dorée avec bombe évidée et ornée du numéro de la légion, puis du régiment, mais reçoit deux soutaches de couleur or, puisqu’elle ne constitue plus désormais qu’une simple subdivision au sein de la cavalerie, au même titre que les cuirassiers, dragons, hussards ou chasseurs à cheval.
L’occupant impose également le port d’un troisième chevron sur les pattes de collet des troupes stationnées en Afrique, non comprises dans les effectifs de l’armée d’armistice, afin de pouvoir distinguer l’origine des permissionnaires lorsqu’ils séjournent en France. Cette particularité sera observée par les unités de la Garde stationnées en Afrique du Nord.
Quant à la gendarmerie départementale, ses pattes de collet sont toujours dépourvues de soutaches, à l'exception de celles de la Garde personnelle du Chef de l’État (GPCE) qui en sont ornées. Le particularisme de cette unité de gendarmerie suffit à expliquer cette différence de traitement. Ses grenades de col sont d'ailleurs complétées par la surimposition de la francisque de l’État français.
La victoire de 1945 est suivie de la réintégration de la Garde dans la gendarmerie. Elle prend alors l’appellation de garde républicaine, puis gendarmerie mobile en 1954. Elle conserve depuis 1945 les doubles chevrons sur ses pattes de collet, pattes d’épaule, losanges de bras, triples chevrons pour les unités stationnées en Afrique du Nord. La bombe de la grenade est néanmoins dépourvue de son numéro, puisque la présence des chevrons suffit au premier coup d’œil à la distinguer de la garde républicaine de Paris.
Dans les années suivant la deuxième Guerre mondiale, certains gendarmes départementaux font apposer, par imitation, les doubles chevrons argent sur leurs attributs distinctifs, sans qu’aucun texte ne cautionne cette pratique. La situation est officialisée par l’instruction du 2 août 1957, qui attribue réglementairement les doubles chevrons à la gendarmerie départementale et à la gendarmerie mobile, la garde républicaine en étant dépourvue. Cette situation perdure depuis.
En conclusion, l’existence ou l’absence de chevrons en gendarmerie résulte d’une évolution uniformologique constante ayant pour but l’identification immédiate des différentes subdivisions ou corps, sans qu’il soit question de formations combattantes ou pas. Il est d’ailleurs utile de rappeler que toutes les unités combattantes de la gendarmerie, levées au XXe siècle comme aux siècles précédents, 45e bataillon de chars de gendarmerie en 1932-40, ou légions de marche de la garde républicaine en Indochine, ont été constituées par prélèvement d’effectifs sur l’ensemble de la gendarmerie, départementale, mobile ou garde républicaine. Il ne peut donc être question de considérer qu’une subdivision plus qu’une autre mérite le droit de porter les chevrons au-dessus de la grenade.
À ce titre, la décision récente de distinguer les personnels CSTAGN par des pattes de collet et des fourreaux d’épaule en drap bleu gendarme, simplement ornés de la grenade argent, constitue une initiative heureuse, respectueuse des traditions de l’Arme et conforme à sa symbolique. Elle permettra de plus la disparition de la terne couleur grise des pattes de collet, fourreaux d’épaule et calots des képis et postillons, et son remplacement par la couleur d’arme bleu gendarme, ce qui constitue un avantage esthétique certain, propre à mieux intégrer ces spécialistes au sein de l’Arme.
Texte écrit par le Colonel Eric DAGNICOURT
Peu de distinctives de l’uniforme de la gendarmerie suscitent autant d’interrogations et d’interprétations que les chevrons des pattes de collet et des fourreaux d’épaules. La méconnaissance n’ayant pas de limites, les « sous-taches » ( !?) identifient même, pour certains, l’ensemble de la patte de collet de la vareuse.
Rappelons donc que la soutache est un effet de passementerie militaire, constituée par un cordonnet de couleur cousu sur un insigne ou un effet d’uniforme. Elle permet de distinguer le grade (soutaches de képi) ou la subdivision d’arme (soutaches de pattes de collet). Par extension étymologique, on tend à utiliser ce terme pour désigner, à tort, les chevrons brodés au-dessus des grenades des fourreaux d’épaules. Après ce bref rappel, l’objet de cette étude est d’expliquer leur apparition sur les insignes de la gendarmerie mobile et de la gendarmerie départementale, ainsi que leur absence de ceux de la garde républicaine et du CSTAGN.
Avant 1914, les armes et subdivisions d’armes de l’armée de terre, à laquelle la gendarmerie est rattachée, se distinguent par les couleurs distinctives des tuniques, pantalons, passepoils et bandes de pantalons, cols, boutons, pattes de parement et de collet des tuniques, bandeau, turban et calot des képis. En ce qui concerne la gendarmerie, dont les couleurs traditionnelles ont été maintenues jusqu’à nos jours, les pattes de collet sont en drap de fond bleu gendarme, ornées d’une grenade, en fil blanc pour les gendarmes, en cannetille d’argent pour les gradés et officiers de la gendarmerie départementale, en fil orange foncé pour les gardes républicains, en cannetille d’or pour les gradés et officiers de la garde républicaine.
L’abandon des couleurs voyantes à la fin de l’année 1914 et leur remplacement par une teinte uniforme, bleu horizon pour les troupes métropolitaines, kaki pour les troupes d’Afrique, puis coloniales, entraîne l’adoption de nouvelles distinctives pour les armes et subdivisions d’armes de l’armée de terre.
Le fond de la patte de collet distingue désormais l’arme, la subdivision de l’arme étant précisée par l’adjonction de deux soutaches de couleur. Ainsi, le fond de la patte de collet est du fond de l’uniforme pour l’infanterie (bleu horizon pour l’infanterie de ligne, bleu foncé pour les chasseurs, kaki pour l’infanterie d’Afrique et coloniale), bleu foncé pour la cavalerie, rouge pour l’artillerie, velours noir pour le génie, vert pour le train, etc.
En ce qui concerne les subdivisions d’armes de l’infanterie, par exemple, les soutaches sont bleu foncé pour l’infanterie de ligne, jonquille pour les chasseurs, rouge pour les zouaves, bleu ciel pour les tirailleurs, vertes pour la légion étrangère, etc.
Le train, qui ne possède pas de subdivisions, n’a pas de soutaches distinctives, de même que les différents services, identifiés par la couleur du fond de la patte de collet et l’existence d’un attribut distinctif brodé. Nous ne rentrerons pas plus dans les détails de ce système, qui pourrait noircir plusieurs pages, mais préciserons cependant que l’existence ou l’inexistence de soutaches distinctives n’a en ce sens rien à voir avec la qualification d’unité combattante.
La gendarmerie conserve à cette époque ses distinctives d’avant-guerre, les deux subdivisions, gendarmerie départementale et garde républicaine se distinguant facilement par la couleur de leurs boutons et de leurs grenades de collet. L’attribution de la qualité de sous-officier à l’ensemble des gendarmes en 1918 modifie la teinte des grenades de la gendarmerie. Celles-ci sont désormais uniformément argent pour la gendarmerie départementale, or pour la garde républicaine.
La création d’une garde républicaine mobile en 1926, et la description de son uniforme, en 1927, ne se traduisent toujours pas par l’apparition des soutaches en gendarmerie. Le fond de la patte de collet de la nouvelle subdivision est bleu gendarme et la grenade est dorée, mais la bombe de cette dernière est évidée et reçoit le numéro de la légion. Il ne peut donc y avoir de confusion avec les pattes de collet de la garde républicaine de Paris.
La défaite de la France en 1940 a pour conséquence, imposée par les clauses d’armistice, la scission de la gendarmerie. La garde républicaine mobile est extraite de l’Arme et désormais rattachée à la cavalerie, sous l’appellation de « Garde ». Elles conserve ses distinctives précédentes, fond de la patte de collet bleu foncé et grenade dorée avec bombe évidée et ornée du numéro de la légion, puis du régiment, mais reçoit deux soutaches de couleur or, puisqu’elle ne constitue plus désormais qu’une simple subdivision au sein de la cavalerie, au même titre que les cuirassiers, dragons, hussards ou chasseurs à cheval.
L’occupant impose également le port d’un troisième chevron sur les pattes de collet des troupes stationnées en Afrique, non comprises dans les effectifs de l’armée d’armistice, afin de pouvoir distinguer l’origine des permissionnaires lorsqu’ils séjournent en France. Cette particularité sera observée par les unités de la Garde stationnées en Afrique du Nord.
Quant à la gendarmerie départementale, ses pattes de collet sont toujours dépourvues de soutaches, à l'exception de celles de la Garde personnelle du Chef de l’État (GPCE) qui en sont ornées. Le particularisme de cette unité de gendarmerie suffit à expliquer cette différence de traitement. Ses grenades de col sont d'ailleurs complétées par la surimposition de la francisque de l’État français.
La victoire de 1945 est suivie de la réintégration de la Garde dans la gendarmerie. Elle prend alors l’appellation de garde républicaine, puis gendarmerie mobile en 1954. Elle conserve depuis 1945 les doubles chevrons sur ses pattes de collet, pattes d’épaule, losanges de bras, triples chevrons pour les unités stationnées en Afrique du Nord. La bombe de la grenade est néanmoins dépourvue de son numéro, puisque la présence des chevrons suffit au premier coup d’œil à la distinguer de la garde républicaine de Paris.
Dans les années suivant la deuxième Guerre mondiale, certains gendarmes départementaux font apposer, par imitation, les doubles chevrons argent sur leurs attributs distinctifs, sans qu’aucun texte ne cautionne cette pratique. La situation est officialisée par l’instruction du 2 août 1957, qui attribue réglementairement les doubles chevrons à la gendarmerie départementale et à la gendarmerie mobile, la garde républicaine en étant dépourvue. Cette situation perdure depuis.
En conclusion, l’existence ou l’absence de chevrons en gendarmerie résulte d’une évolution uniformologique constante ayant pour but l’identification immédiate des différentes subdivisions ou corps, sans qu’il soit question de formations combattantes ou pas. Il est d’ailleurs utile de rappeler que toutes les unités combattantes de la gendarmerie, levées au XXe siècle comme aux siècles précédents, 45e bataillon de chars de gendarmerie en 1932-40, ou légions de marche de la garde républicaine en Indochine, ont été constituées par prélèvement d’effectifs sur l’ensemble de la gendarmerie, départementale, mobile ou garde républicaine. Il ne peut donc être question de considérer qu’une subdivision plus qu’une autre mérite le droit de porter les chevrons au-dessus de la grenade.
À ce titre, la décision récente de distinguer les personnels CSTAGN par des pattes de collet et des fourreaux d’épaule en drap bleu gendarme, simplement ornés de la grenade argent, constitue une initiative heureuse, respectueuse des traditions de l’Arme et conforme à sa symbolique. Elle permettra de plus la disparition de la terne couleur grise des pattes de collet, fourreaux d’épaule et calots des képis et postillons, et son remplacement par la couleur d’arme bleu gendarme, ce qui constitue un avantage esthétique certain, propre à mieux intégrer ces spécialistes au sein de l’Arme.
Président- Admin
- Messages : 637
Date d'inscription : 23/12/2018
Age : 57
Localisation : BOUCHES DU RHÔNE -
Claude membre bienfaiteur aime ce message
Re: SOUTACHES, CHEVRONS ET GRENADES
par Claude membre bienfaiteur Ven 14 Jan - 11:28
merci pour le compte rendu d'Eric.
Claude membre bienfaiteur- Messages : 324
Date d'inscription : 24/12/2018
Age : 65
Localisation : Luberon
Re: SOUTACHES, CHEVRONS ET GRENADES
par MISF Jeu 2 Mar - 14:46
Merci Eric pour ces précisions.
J'adore ce type de sujet.
Il est exact que la couleur grise choisie pour les personnels CSTAGN n'était pas la plus appropriée.
"Les petits gris" ont disparu.
A plus.
Eric
J'adore ce type de sujet.
Il est exact que la couleur grise choisie pour les personnels CSTAGN n'était pas la plus appropriée.
"Les petits gris" ont disparu.
A plus.
Eric
MISF- Messages : 42
Date d'inscription : 13/01/2023
Président aime ce message
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